EDF : Le plan Hercule

A la sortie de cet été 2019, le gouvernement a demandé à la direction d’EDF de travailler sur un plan de réorganisation de l’opérateur historique. Le 4 octobre 2019, le PDG d’EDF, Jean Bernard Levy, a annoncé qu’il ne présenterait pas ce plan avant la fin d’année comme convenu, mais en 2020.
Contexte
Créé à la sortie de la seconde guerre mondiale, le capital d’EDF est toujours détenu principalement par l’Etat Français, à hauteur de 83,70%.
Aujourd’hui, les principales filiales d’EDF sont :
- FRAMATOME (conception des centrales nucléaires)
- RTE (gestionnaire du réseau de transport)
- ENEDIS (gestionnaire du réseau de distribution)
- EDF RENOUVELABLES (Financement et construction des installations renouvelables)
- DALKIA (services de performance énergétique)
Alors que le parc nucléaire d’EDF est vieillissant, et que la stratégie énergétique de la France est plus qu’hésitante au cours des dernières décennies, les 35 Milliards d’euros de dette d’EDF représentent aujourd’hui près de 200% de son EBITDA (source : Résultats annuels 2018 EDF).
Les retards et les défauts sur la fabrication de plusieurs réacteurs EPR ne sont d’ailleurs pas de nature à laisser entrevoir un avenir plus radieux à EDF.
Aussi, dans le cadre de la libéralisation du marché de l’énergie en France, impulsée par la commission européenne, EDF s’est retrouvée dans une situation quelque peuschizophrénique.
En effet, EDF doit, en tant que producteur, vendre une partie de sa production d’électricité d’origine nucléaire (ARENH) aux fournisseurs alternatifs à prix coûtant.
Ces derniers arrivent ainsi à commercialiser cette électricité à un coût moindre qu’EDF auprès des consommateurs, ce qui leur permet de récupérer une part grandissante du portefeuille client d’EDF en tant que fournisseur.
Une scission d’EDF à venir
Sur demande du président Macron, Jean-Bernard Levy a donc dû travailler sur un plan de réorganisation des activités d’EDF, baptisé plan Hercule.
Actuellement en gestation, et sans aucune existence officielle, ce plan Hercule prévoit d’ici 2022 la séparation du groupe EDF en 2 entités :
- Une première, dite EDF bleu, qui sera contrôlée à 100% par l’Etat Français, et qui inclura : le nucléaire, les actifs hydrauliques, le commerce sur les marchés de gros, ainsi que le transport d’électricité.
- Une seconde dite EDF vert, dont 35% du capital serait introduit en bourse, et qui inclura : les énergies renouvelables, la distribution d’électricité (Enedis), la commercialisation auprès des entreprises et particuliers, les activités d’Outre-mer et de la Corse, ainsi que les autres services.
Les objectifs de cette scission sont clairs pour le gouvernement : le fait de se « débarrasser » de certaines activités permettra de focaliser les investissements sur celles qui revêtent un rôle stratégique pour la France (EDF Bleu), dans un contexte d’endettement déjà très pesant.
En effet, une cinquantaine de milliards d’euros sera nécessaire d’ici 2025 pour financer la prolongation et le renouvellement du parc nucléaire Français.

Bruno Lemaire, Ministre de l'Economie
« Nous garantirons l'intégrité d'EDF et nous ferons en sorte qu'EDF reste le fleuron industriel national qu'il est aujourd’hui ».
Aussi, le fait de séparer l’activité de production et l’activité de commercialisation est érigée comme une solution à l’organisation de la concurrence sur le marché de l’électricité en France, correspondant ainsi aux exigences de la Commission Européenne.
Face à ce vaste projet de réorganisation du géant de l’énergie Français, nombreux sont ceux qui manifestent une virulente opposition (syndicats, associations de consommateurs, responsables politiques …), tant les sujets d’inquiétude sont nombreux :
- Les régimes de retraites des salariés d’EDF
- La privatisation des activités les plus rentables d’EDF risque de faire d’EDF un gestionnaire d’actifs échoués
- L’Etat va perdre plusieurs leviers pour piloter la transition énergétique
- L’arrivée de nouveaux acteurs dans le capital de l’EDF vert inquiète (perte de vision long terme, puissances étrangères aux intérêts divergents …)
- Le fait que le réseau de distribution soit privatisé alors que le réseau de transportreste public risque d’être générateur de conflits

François Dos Santos, Élu CGT et secrétaire du comité central d'entreprise d'EDF
« Cela revient à nationaliser ce qui coûte et privatiser ce qui rapporte et au final fragiliser toutes les parties ».
Le calendrier à venir
Auditionné par le Sénat le 13 Novembre 2019, Jean-Bernard Levy a assuré que sans révision de l’ARENH, qualifié de « mécanisme asymétrique et injuste », il ne sera pas en mesure d’entamer une « réorganisation d’EDF ».
Le PDG d’EDF a une nouvelle fois demandé à ce qu’un accord soit trouvé afin de relever le prix auquel EDF vend une partie de sa production aux fournisseurs alternatifs, et dont la régulation ne dépend que de 2 autorités : le gouvernement Français, et la Commission Européenne.
La nouvelle commission européenne, prenant ses fonctions au 1 er Décembre 2019 sous l’impulsion de Ursula von der Leyen, l’accord sur les modalités de l’ARENH n’est pas prêt d’être fixé, repoussant ainsi l’annonce officielle du plan Hercule, qui de toute façon devra faire l’objet de moult négociations.
Votre budget d'énergie sous contrôle
La pédagogie, les meilleurs offres, les meilleurs prix, et des outils pour piloter… Découvrez l'expérience Limpide pour renégocier vos contrats !